29 avril 2024

leun2trois.com

Comprendre pour informer pour rendre compte de ce qui se passe dans le monde

Génocide au Rwanda

Génocide au Rwanda : La justice française clôt le dossier sur l’attentat déclencheur du massacre

ENQUETE L’attaque en 1994 de l’avion transportant le président rwandais de l’époque Juvénal Habyarimana, un Hutu, est considérée comme le point de départ du génocide qui fit plus de 800.000 morts

C’est la fin d’une enquête qui aura empoisonné les relations franco-rwandaises pendant plus de vingt ans. Ce mardi, la Cour de cassation a définitivement clos le dossier de l’attentat qui a déclenché le génocide de 1994 au Rwanda. La plus haute juridiction de l’ordre judiciaire français a rejeté les pourvois déposés par les familles de victimes de l’attentat contre l’avion du président rwandais Juvénal Habyarimana.

Celles-ci entendaient contester, sur des points de droit, l’abandon des poursuites contre plusieurs membres de l’entourage du président rwandais actuel Paul Kagame, confirmé en 2020 par la cour d’appel de Paris.

Rappel des faits

Le 6 avril 1994, l’avion transportant le président rwandais de l’époque Juvénal Habyarimana, un Hutu, et le président burundais Cyprien Ntaryamira avait été abattu en phase d’atterrissage vers Kigali par au moins un missile. L’attentat est considéré comme le point de départ du génocide qui fit plus de 800.000 morts selon l’ONU, principalement dans la minorité tutsi.

Les enquêteurs français, saisis en 1998 après la plainte des familles de l’équipage, de nationalité française, ont longtemps privilégié la responsabilité des rebelles tutsi menés par Paul Kagame. Puis ils se sont orientés un temps – sans davantage aboutir – vers l’implication d’extrémistes hutu, soucieux de se débarrasser d’un président trop modéré à leurs yeux.

Assassinats et disparitions de témoins

Le 21 décembre 2018, les juges d’instruction avaient finalement décidé d’abandonner les poursuites contre neuf membres ou anciens membres de l’entourage de Paul Kagame, qui avaient suscité de fortes tensions dans les relations entre Paris et Kigali. « En l’absence d’éléments matériels indiscutables », l’accusation reposait sur des témoignages « largement contradictoires ou non vérifiables », avaient-ils estimé. Les magistrats avaient souligné par ailleurs le « climat délétère » de l’enquête, émaillée d’assassinats, de disparitions de témoins et de manipulations, et ordonné un non-lieu.

Dans sa décision de mardi, la Cour de cassation a estimé que la cour d’appel de Paris, qui avait confirmé la décision des juges en juillet 2020, avait « exposé, par des motifs exempts d’insuffisance comme de contradiction, que l’information était complète et qu’il n’existait pas de charges suffisantes contre quiconque d’avoir commis les crimes reprochés, ni toute autre infraction ».

Pour le chercheur François Graner, membre de l’association Survie, engagée contre la Françafrique, « c’est la fin d’une instruction bâclée, d’une enquête à charge ». « Pour les relations entre les deux pays, une nouvelle page s’ouvre, ça libère l’horizon diplomatique qui s’était déjà bien dégagé » depuis le rapport de la commission d’historiens Duclert, a-t-il observé, ajoutant que cet attentat faisait « partie des grandes affaires non élucidées ».

M.F avec AFP