17 juin 2024

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Niger et le Bénin à propos de la fermeture des frontières terrestres

Comment Niamey subit les conséquences de la fermeture de la frontière Niger- Bénin

Près de dix mois déjà que le Niger a fermé sa frontière avec son voisin du sud le Bénin. Pendant que les discussions entre les autorités des deux pays sur la réouverture achoppent, les populations nigériennes ressentent de plein fouet les conséquences.

Omar Garba est un agent de transit spécialisé dans l’organisation et le transport des marchandises en provenance du Bénin. Depuis plus de neuf mois, le quadragénaire père de deux enfants est au chômage. Son quotidien se résume désormais à passer des heures à la fada (regroupement des jeunes autour du thé).

Sa nouvelle situation est la conséquence directe de la fermeture des frontières entre le Niger et le Bénin.

« La fermeture de la frontière Nigéro-béninoise nous a beaucoup affectés et il n’y a pas un seul transitaire qui peut dire le contraire », déclare-t-il.

La fermeture de la frontière entre le Niger et le Bénin rallonge le chemin des chaînes d’approvisionnement, de ce pays qui n’a pas de façade maritime.

Les tensions continuent de monter entre le Niger et le Bénin à propos de la fermeture des frontières terrestres

Les autorités nigériennes et béninoises durcissent le ton au sujet de la fermeture de la frontière terrestre entre leurs deux pays.

Lors d’une rencontre avec des opérateurs économiques nigériens, mardi, le Premier ministre nigérien Ali Mahamane Lamine Zene a invité les opérateurs économiques ayant des marchandises au port de Cotonou à les retirer.

“Si vous avez quelques containers au Bénin, il faut les envoyer au Togo”, a-t-il indiqué, précisant que toutes les autres frontières sont désormais accessibles au Niger, dont celles du Tchad, de l’Algérie et de la Libye.

Expliquant la décision du Niger de maintenir la fermeture de sa frontière terrestre avec le Bénin, Ali Mahamane Lamine Zene a déclaré qu’il y a au Bénin “des “soldats non-béninois qui animent cinq points, dont la base la plus importante et la plus dangereuse est située au bord du parc du W où ces soldats entraînent des terroristes”.

Lors d’un point de presse animé le 11 mai courant, le Premier ministre nigérien a clairement indiqué qu’il s’agit des soldats français chassés du Niger qui sont revenus s’installer à la frontière entre le Bénin et le Niger.

Dans la foulée de ces événements des responsables militaires et diplomatiques français et béninois ont démenti toute présence de bases françaises au Bénin, à l’occasion de déclarations accordées à Anadolu.

Par ailleurs, les autorités du Bénin ont fermé, mercredi, la voie de contournement qu’empruntent des populations béninoises et nigériennes pour joindre les deux pays depuis la fermeture de la frontière.

Selon des sources médiatiques, ces populations utilisaient des pirogues pour traverser le fleuve.

Depuis les sanctions prises par la Communauté économique des États de l’Afrique de l’ouest (CEDEAO) contre le Niger en juillet dernier, la frontière terrestre avec le Bénin est toujours fermée.

Il y a quelques jours, en réaction au maintien de la fermeture de cette frontière,le Bénin avait bloqué l’embarquement du pétrole brut nigérien à partir de son port de Sèmé.

La mesure a été finalement levée suite à une médiation de la Chine, en l’occurrence la société CNPC qui assure la commercialisation du pétrole nigérien sur le marché international.

Gaya, la ville carrefour commercial et centre de transit a perdu son ambiance d’antan depuis plusieurs mois du fait de la fermeture de la frontière béninoise. Les commerçants grossistes assistent impuissants à l’effondrement de leurs business.

« Avant, quand on vient à Gaya, on trouve au moins 500 camions en provenance du Bénin, aujourd’hui il n’y a rien. Cette situation est une grande perte et pour le Bénin et pour le Niger », déplore Tagazar Garba, président des commerçants de Gaya. Il souligne aussi qu’avant, les échanges commerciaux entre Gaya (première ville nigérienne) et Malanville (dernière ville béninoise à la frontière) étaient très florissants et qu’avec la fermeture de la frontière les activités commerciales sont au ralenti.

Pour contourner la fermeture des frontières, à Gaya ville frontalière avec le Bénin, les commerçants utilisent le transport fluvial en vue d’acheminer des céréales comme le maïs, la farine de manioc, le tapioca ou encore des tubercules comme l’igname.

Pertes économiques au Niger et au Bénin

« 80% des importations nigériennes transitent par le Bénin. Quand ces importations ont été bloquées, il y a eu pénuries de produits pharmaceutiques et ceux de première nécessité et l’économie du Niger a subi de plein fouet cette situation », explique l’économiste Soly Abdoulaye.

Si l’on ne sait pas ce que le port de Cotonou perd, et par ricochet, l’ensemble de l’économie du pays, on sait au moins que son taux de croissance a connu un ralentissement.

Le Fonds Monétaire International prévoyait un taux de croissance à 6 % en 2023, avant de la revoir à 5,4 %. L’une des raisons en est la fermeture de la frontière avec le Niger, expliquait le FMI dans un communiqué publié fin octobre 2023.

Coté, nigérien, les autorités ont tenté une solution, en adoptant des reformes d’allègement de taxes et impôts que l’Etat prélevait sur les importations des produits, une manière de diminuer les charges pour que les commerçants arrivent à écouler leurs produits sur les marchés à un prix abordable souligne l’économiste Soly Abdoulaye.

À en croire l’agence Ecofin, les autorités béninoises ont annoncé en avril dernier, avoir augmenté les recettes douanières de 14 %, en 2023. Une augmentation qui est restée quand même en deçà de la moyenne observée dans ces recettes depuis la sortie de l’hibernation, due à la pandémie de coronavirus, poursuit Ecofin.

SOURCE : MÉDIAS