24 avril 2024

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Kylian Mbappé

Tir au but manqué: dans la tête de Kylian Mbappé

Une étude néerlandaise s’est penchée sur l’activité cérébrale des joueurs lors d’un penalty. Pour les chercheurs, les échecs sont associés à trop de réflexion 

Kylian Mbappé a raté le cinquième tir au but face à la Suisse hier soir, éliminant du même coup la France du quart de finale de l’Euro. «Je suis désolé pour ce penalty.

J’ai voulu aider l’équipe mais j’ai échoué», s’est-il empressé d’écrire sur Instagram. Côté suisse, Ricardo Rodriguez aussi a raté son penalty à la 55e minute. Il est assez fréquent que ce soit la star de l’équipe qui rate ce tir.

C’est ainsi arrivé au capitaine de l’équipe de Suisse Granit Xhaka à l’Euro 2016 contre la Pologne, à Lionel Messi lors de la finale de la Copa America perdue par l’Argentine contre le Chili en 2016, à Cristiano Ronaldo avec Manchester United contre Chelsea en finale de la Ligue des champions 2008, à l’Anglais David Beckham lors de l’Euro 2004 contre le Portugal, à l’Italien Roberto Baggio en finale de la Coupe du monde 1994 contre le Brésil, à l’Argentin Diego Maradona contre la Yougoslavie en quart de finale de la Coupe du monde 1990.

Lors du match France-Brésil à la Coupe du monde 1986, trois pénaltys furent manqués par le Français Michel Platini et les Brésiliens Zico et Socrates, trois des footballeurs les plus brillants et les plus doués techniquement de l’histoire du football. Mais comment un joueur professionnel peut-il louper cet exercice pour lequel il s’est entraîné pendant des heures?

Face au Portugal, le 23 juin dernier, Karim Benzema a marqué un but pour la France sur penalty. Cristiano Ronaldo a fait de même pour son équipe. Le moment est crucial et la pression sur les joueurs est énorme. Une étude hollandaise a essayé de comprendre ce qu’il se passait dans le cerveau des joueurs au moment d’envoyer le ballon de foot dans la lucarne, et surtout comment la pression et le stress altèrent leur performance. Ils publient leurs résultats dans Frontiers in Computer Science.

Cortex moteur VS cortex préfrontal

Les scientifiques de l’université de Twente n’ont pas pu faire leur mesure sur des joueurs de football professionnels, mais sur 22 volontaires, expérimentés ou non, auxquels il leur a été demandé de tirer 15 penaltys chacun selon un protocole défini et avec un niveau de pression croissant. Les 5 premiers penaltys ont été tirés sans gardien, les 5 suivants avec un gardien amical et les 5 derniers avec un gardien agressif. Pendant leur tir, des capteurs ont mesuré l’oxygénation du cerveau, ce qui témoigne de son activité, par spectroscopie fonctionnelle infrarouge.

Les scientifiques se sont intéressés à l’activité du cerveau lorsque le penalty est réussi ou non et comment il réagit à la pression. Il apparaît que leurs observations concordent avec la théorie de l’efficacité neuronale qui stipule que l’on peut atteindre une performance optimale en activant les zones cérébrales liées à cette performance.

En clair, pour tirer un penalty, les scientifiques s’attendent à observer une activité importante dans le cortex moteur qui planifie, contrôle et exécute les mouvements. Et en effet, les penaltys réussis sont liés à une activation de cette partie du cerveau.

Résister à la pression

Mais le niveau de stress et d’anxiété change la donne. Les volontaires ont expérimenté la plus grande pression lors de leur dernier tir. À ce moment, le cortex préfrontal est plus actif, au détriment du cortex moteur. Selon les scientifiques, cela s’explique par le fait que les volontaires ont plus réfléchi aux conséquences de leur tir, qu’il soit réussi ou manqué, qu’au bon geste pour marquer un but.

Résultat, lors d’un penalty, un joueur de foot peut se laisser envahir par l’anxiété, craquer sous la pression et rater son tir. Que ce soit Kylian Mbappé ou un footballeur du dimanche.

Par Julie Kern Rédactrice scientifique futura-sciences