29 mars 2024

leun2trois.com

Comprendre pour informer pour rendre compte de ce qui se passe dans le monde

La juge Ketanji Brown Jackson

Ketanji Brown Jackson devant la commission judiciaire du Sénat à Washington, DC, le 28 avril 2021. (KEVIN LAMARQUE / AFP)

Qui est Ketanji Brown Jackson, la première femme noire aux portes de la Cour suprême des États-Unis ?

Bien que nommée par le président américain Joe Biden, la juge doit encore attendre la validation du Sénat.

La juge Ketanji Brown Jackson, nommée ce vendredi 25 février par Joe Biden à la Cour suprême des États-Unis, admet avoir « une expérience de la vie un peu différente » de ses collègues, et pas uniquement parce qu’elle est noire.

Si elle est confirmée par le Sénat, cette brillante juriste de 51 ans deviendra la première magistrate afro-américaine au sein de la haute institution, où n’ont siégé jusqu’ici que deux hommes noirs. Mais elle sera aussi l’une des rares à avoir une expérience professionnelle et intime du système pénal.

Avocate avant d’être juge

Alors que la plupart des juges de ce niveau se sont distingués comme procureurs, Ketanji Brown Jackson a travaillé du côté des accusés : pendant deux ans, elle a été avocate dans les services de l’aide juridictionnelle à Washington, où elle a défendu des prévenus sans ressources. « Frappée » par leur méconnaissance du droit, elle a pris « grand soin » d’expliquer ses décisions aux condamnés une fois devenue juge.

Plus personnel encore : un de ses oncles a écopé en 1989 d’une peine de prison à vie dans le cadre d’une loi très répressive qui imposait automatiquement la réclusion à perpétuité après trois infractions aux lois sur les stupéfiants. Même si elle n’était pas proche de lui, « cette expérience familiale l’a sensibilisée à l’impact de la loi sur la vie des gens », a raconté au « Washington Post » un ami, sous couvert d’anonymat.

La championne des concours d’éloquence

Ketanji Brown Jackson a eu une enfance très stable dans une famille d’enseignants installée en Floride. Son père avait ensuite repris des études de droit et est devenu juriste dans un conseil d’école, tandis que sa mère se hissait au rang de directrice.

Championne de concours d’éloquence dès le lycée, elle brille et rejoint la prestigieuse université Harvard, dont elle sort diplômée avec mention. Dans les années qui suivent, elle alterne les expériences dans le privé et le public.

Elle travaille notamment comme assistante du juge progressiste de la Cour suprême Stephen Breyer, qu’elle est désormais appelée à remplacer. Elle exerce dans des cabinets d’avocats mais aussi à la Commission des peines, une agence indépendante chargée d’harmoniser la politique pénale aux États-Unis.

« Les présidents ne sont pas des rois »

En 2013, le président démocrate Barack Obama la nomme juge fédérale à Washington. Mariée à un chirurgien, avec qui elle a deux filles, Ketanji Brown Jackson a un lien familial par alliance avec le président républicain de la Chambre des représentants de l’époque, Paul Ryan, qui la présente avec des louanges sur son « intelligence, sa personnalité et son intégrité ». Elle est confirmée sans difficulté.

Au cours des huit ans qui suivent, elle rend des dizaines de décisions. Elle désavoue notamment Donald Trump, qui essaie d’empêcher le Congrès de convoquer un de ses conseillers, en écrivant : « le principal enseignement des 250 ans d’Histoire américaine, c’est que les présidents ne sont pas des rois ».

Dès son arrivée à la Maison Blanche, Joe Biden la nomme au sein de l’influente Cour d’appel fédérale de Washington, considérée comme un tremplin pour la Cour suprême. Malgré les profondes divisions politiques au Sénat, elle est confirmée avec le soutien de tous les démocrates et de trois républicains.

Interrogée par un élu lors du processus de confirmation, elle jure de mettre à l’écart « ses opinions personnelles et toute autre considération inappropriée », dont sa couleur de peau, dans son examen des dossiers. Mais « j’ai peut-être une expérience de la vie différente de celle de mes collègues », reconnaît-elle sobrement. « Et j’espère que cela peut avoir un intérêt. »

Par L’Obs avec AFP