19 avril 2024

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L'ancien président Alpha Condé

L'ancien président Alpha Condé

Guinée : il y a un an, les militaires annonçaient la fin du régime Condé

Depuis un an, de nombreuses décisions de la junte militaire ont contribué à alimenter un climat de tension au sein de la classe politique et de la société civile.

C’est le matin du 05 septembre 2021 que l’ancien président Alpha Condé a été renversé par le Comité national pour le rassemblement et le développement avec à sa tête le colonel Mamady Doumbouya.  Sur les antennes des médias de services publics, voici  la toute première déclaration du chef de la junte.  

“Peuple souverain de Guinée, nous avons décidé à partir de cet instant de dissoudre la constitution. Nous allons écrire une constitution ensemble. La personnalisation de la vie politique est terminée. Nous n’allons plus confier la politique à un homme mais au peuple de Guinée” , avait déclaré en substance Mamady Doumbouya.

Concertation nationale

Juste après ce putsch, la junte avait engagé une concertation nationale entre toutes les entités du pays. Mais ce rapprochement entre une partie de la classe politique et les militaires n’aura été que de courte durée et aujourd’hui, le pouvoir de transition est à couteaux tirés avec certains acteurs politiques et une partie de la société civile.

C’est le cas de l’Union des forces démocratiques (UFDG) dirigée par Cellou Dalein Diallo. Cette formation politique qualifie la gestion du Comité national du rassemblement pour le développement (CNRD)  de catastrophique. 

Selon Joachim Baba Milimono,  le responsable de communication du parti, “le  colonel Mamady Doumbouya avait promis dans son discours de prise de pouvoir que nul ne mourra désormais en raison de son opinion. Hélas, combien de personnes sont détenues aujourd’hui en prison à cause de son opinion. Combien de leaders politiques se trouvent aujourd’hui en exil en raison de leur opposition à la manière dont le CNRD est en train de conduire la transition ? “

Dissolution et calendrier électoral non consensuel

Le FNDC, le Front national pour la défense de la Constitution, a été dissous et les manifestations interdites sur toute l’étendue du territoire national.  Mais selon certains observateurs, la junte peut également se targuer d’avoir réalisé certains progrès, notamment l’achèvement de certaines infrastructures routières. 

Peu importe, pour Aboubacar Doura Koita, acteur de la société civile et président de la jeunesse Cédéao, le bilan d’un an du CNRD est mitigé. 

“Je pense que de façon globale il faut dire clairement que le bilan est très mitigé.  Il y a un certain nombre d’éléments qu’il va falloir relever. Il y a des points qui sont positifs, il y a aussi des points négatifs. Ces points négatifs il va falloir les corriger pour nous permettre d’avoir une transition à la hauteur de nos attentes”, explique-ti-l.

Lire aussi : https://leun2trois.com/guinee-combien-de-temps-va-durer-la-transition-la-grande-interrogation/ : Guinée : il y a un an, les militaires annonçaient la fin du régime Condé

Au mois de mai dernier le chef de la junte avait proposé une durée de la transition de 39 mois qui a été réduite à 36 mois. Le calendrier a toutefois été rejeté par la classe politique et même la  Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao). L’organisation sous-régionale a dépêché l’ancien président béninois comme médiateur dans la crise guinéenne.Thomas Boni Yayi vient d’achever sa deuxième mission au cours de laquelle il a rencontré tous les acteurs sociaux politiques. La Cédéao attend désormais son rapport. 

À Bambeto, le désenchantement s’installe un an après le coup d’État

Il y a un an, la chute d’Alpha Condé avait été célébrée par des scènes de liesse au rond-point de Bambeto, traditionnel foyer contestataire à Conakry. Douze mois plus tard, les espoirs suscités par le coup d’Etat ont été en grande partie douchés.

Dans une petite maison du quartier, des responsables de la société civile reçoivent un invité spécial : Ismaël Baldé, conseiller juridique du président du CNT. « S’il vous plait, faisons-en sorte qu’il n’y ait pas de violences. Il faudrait qu’on véhicule ce message, pour que ceux qui jadis lançaient des cailloux puissent se retrouver au sein des organisations [de la société civile] comme ça pour dire : “aidez-nous”. Et je sais que les autorités de la transition vont s’y mettre pour pouvoir satisfaire la jeunesse de la commune. »

L’opération séduction intervient après la mort de 9 personnes sur l’Axe. Des victimes des forces de sécurité selon les militants pro-démocratie comme Ibrahima Aminata Diallo. Il est président de la Conapaid, membre du Forum des forces sociales de Guinée. « Nous ne sommes pas totalement désespérés dans la mesure où il y a encore une porte de sortie. Il y a le dialogue annoncé. C’est à l’issue de ce dialogue que nous allons nous prononcer pour la suite des évènements. »

Il ne fait pas partie des plus pessimistes à Bambeto. Un peu plus loin, dans un café, un jeune manifestant lâche ses coups. « Le CNRD n’est plus notre ami. Lorsqu’il a enlevé le professeur Alpha Condé, on était content. Un an après, c’est la galère totale. L’année est foutue pour le moment. On attend qu’il fasse les élections et parte. »

Depuis trois mois, Bambeto vit de nouveau au rythme des manifestations et de leur répression. 

Texte par :RFI & dw