20 avril 2024

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Les damnés du cobalt

Le cobalt est un minerai d'avenir présent dans les batteries électriques.

En République démocratique du Congo, la Chine a mis la main sur “l’or bleu”, et les “forçats du cobalt”

La ville de Kolwezi, au sud de la République démocratique du Congo, est construite sur la plus grosse réserve de cobalt au monde : 25 millions de tonnes. Elle est devenue la capitale mondiale de ce minerai indispensable à nos batteries électriques, que la planète entière s’arrache. De nombreux petits propriétaires locaux se sont convertis à ce nouveau secteur d’activité en exploitant le gisement qui se trouve sous leur maison – de manière artisanale et sans aucune sécurité.

A Kolwezi, Hervé, un informaticien congolais de 28 ans, a changé d’activité quand il a découvert un filon de cobalt juste sous sa maison. Tout comme son jeune frère Jean-Baptiste (qui, lui, était menuisier), il est devenu mineur. Sa petite propriété est désormais une concession minière, comme presque toutes les parcelles de son quartier – elles-mêmes voisines de mines à ciel ouvert exploitées par des compagnies étrangères, en majorité chinoises. 

Un journaliste d'”Envoyé spécial” a accompagné Hervé et son frère dans le puits qu’ils ont foré à l’emplacement de leurs anciennes toilettes. La descente, sans casque ni harnais, accroché à une simple corde, est périlleuse. Pour poser les pieds, de simples encoches ont été creusées dans la roche. Quinze minutes plus tard, à 15 mètres de profondeur, les premières traces du minerai sont visibles : une ligne noire horizontale sur la paroi.

Pour seul étayage, des sacs de gravats

Cinq mètres plus bas, à 20 mètres, deux galeries partent du puits, avec pour seul étayage des sacs de gravats. Hervé affirme qu’il n’y a pas de risque d’éboulement, mais confie qu’il tremblait de peur lors de sa première descente. A cette profondeur où l’air se fait rare, c’est un système rudimentaire de soufflerie qui apporte l’oxygène. Comme dans tout le quartier, l’électricité qui l’alimente est fournie par un générateur au fonctionnement capricieux. Une coupure oblige le trio à remonter à la surface. L’entreprise s’avère encore plus compliquée que la descente…

Pour fabriquer une seule batterie destinée aux véhicules électriques qui doivent contribuer à la transition énergétique, il faut dix kilos de cobalt. Hervé en remonte une tonne par mois de sa mine artisanale, qu’il vend 1 100 euros. Sur les marchés mondiaux, la tonne de cobalt raffiné se revendra 50 000 euros, soit 45 fois plus cher. 

Extrait du reportage “Les damnés du cobalt” à voir dans “Envoyé spécial